L’étude de la jurisprudence a été menée dans la rubrique « comment définir la jurisprudence » et plus précisément dans « comment se forme la jurisprudence » et « quel est le rôle de la jurisprudence ».
Aussi, son étude doit être rapprochée en parallèle à la notion de « doctrine ». En effet, la jurisprudence et la doctrine sont deux notions pouvant être qualifiées de complémentaires. La doctrine joue un rôle important dans le développement de la jurisprudence.
Qu’est-ce que la jurisprudence ?
Pour rappel, la jurisprudence correspond à l’ensemble des décisions de justice lors d’un litige sur lequel le juge doit se prononcer. Plus encore, on peut définir la jurisprudence comme l’habitude prise par les Tribunaux de juger un différend au regard d’une solution émise par une juridiction dont la règle de droit est similaire.
Qu’est-ce que la doctrine ?
La doctrine quant à elle, désigne d’une manière globale, l’ensemble des avis et opinions sur le droit exprimés par des juristes. En d’autres termes, la doctrine est le résultat d’une réflexion portant sur une règle de droit ou sur une situation juridique. Elle se manifeste à travers d’écrits tels que :
- les livres,
- les écrits ponctuels (ex: les notes doctrinales),
- les traités généraux,
mais également de manière orale au travers de l’enseignement du droit.
La jurisprudence et la doctrine sont-elles des sources indirectes de droit ?
En réalité, ces deux notions à des degrés différents peuvent être considérées comme des sources indirectes de droit.
Concernant d’une part la place de la jurisprudence, le code civil regorge de principes généraux rendant sa compréhension et son application à un litige souvent complexe. De la sorte, il arrive que l’interprétation de la loi se révèle nécessaire. Le rôle de la jurisprudence va être d’interpréter clairement ou largement le texte imprécis ou incomplet. Parfois, il arrive que cette interprétation soit créatrice de droit.
Concernant d’autre part la place de la doctrine, elle contribue par son influence à la construction de l’édifice du droit.
Afin d’appréhender plus en détail, la corrélation entre ces deux notions, l’étude de la doctrine est nécessaire.
Le rôle de la doctrine
L’influence de la doctrine
La fonction de la doctrine est de présenter une construction juridique en la définissant, en expliquant les conditions de sa mise en oeuvre et ses effets sur la société. Les théoriciens du droit doivent faire de cette construction juridique, un examen méticuleux, comparatif et critique.
De ce fait, la doctrine a pour rôle d’influencer le juge dans sa prise de décision, mais ne s’impose pas à celui-ci. Autrement dit, la doctrine n’est qu’une opinion découlant des professionnels du droit. Entre autres, elle n’a pas force de loi, mais permet le perfectionnement du droit et son adéquation avec l’évolution de la société.
À titre d’exemple, le mouvement doctrinal sur la théorie du risque opéré par les juristes Raymond SALEILLES et Louis JOSSERAND a influencé la jurisprudence sur la responsabilité du fait des choses. En effet, la Cour de cassation par un arrêt du 16 juin 1896, dit l’affaire du remorqueur, a interprété plus largement l’article 1384 alinéa 1er.
En l’espèce, une chaudière d’un remorqueur explose tuant un ouvrier qui travaillait dessus. La Cour de cassation a énoncé que le propriétaire de la chaudière, ici le patron, était tenu de réparer le dommage causé par la chose dont il est propriétaire. Cet arrêt s’inscrit dans le mouvement doctrinal de l’époque.
Puis, le législateur va intervenir en limitant la responsabilité du fait des choses par la loi du 9 avril 1898 concernant les accidents du travail, en instaurant une responsabilité automatique et forfaitaire de l’employeur.
Autre exemple de l’influence déterminante de la doctrine sur la jurisprudence : l’assemblée plénière de la cour de cassation a rendu 4 arrêts le 1er décembre 1995 sur la question du prix dans les contrats-cadres. Elle a décidé que dans les conventions cadres l’indétermination du prix (…) n’affect[ait] pas, sauf dispositions légales particulières, la validité de celles-ci » et, plus généralement, que « l’article 1129 du Code civil [n’était] pas applicable à la détermination du prix ». Par cette décision, la Haute juridiction a opéré un revirement de jurisprudence, influencé par le mouvement doctrinal du praticien du droit, Laurent AYNÈS.
Ensuite, D. MAZEAUD et C. JAMIN, théoriciens du droit, ont élaboré le principe de « solidarisme » au sein du contrat, c’est-à-dire que les parties au contrat doivent collaborer à la bonne exécution du contrat. Leur influence a été déterminante sur le terrain de l’exécution de bonne foi du contrat et sur sa rupture.
Le rôle pédagogique de la doctrine
Enfin, la doctrine revêt un rôle pédagogique, il arrive que le juge confie à un théoricien du droit, la mission de réformer un domaine du droit. Ils peuvent également être amenés à travailler sur des projets de loi ou propositions de loi.
L’influence du Doyen Jean CARBONNIER a joué un rôle considérable lors de la rénovation du droit civil depuis les années 1960.
Ainsi, en confrontant la jurisprudence et la réalité sociale et économique de la société, au regard des autres textes, la doctrine édifie un ensemble explicatif.
La doctrine est donc nécessaire au bon développement de la jurisprudence.