Qu’est-ce qu’un moyen de droit ?

Dans l’analyse de la jurisprudence, des moyens sont des arguments dont se prévalent les parties devant une juridiction pour fonder leurs prétentions ou leurs défenses.

Les prétentions

Pour soumettre sa prétention, le plaideur doit par un acte juridique prendre l’initiative du procès. Cet acte juridique, est appelé « demande introductive d’instance ou demande initiale ».

Il existe aussi des demandes incidentes (article 63 du code de procédure civil) qui interviennent au cours du procès. On distingue trois sortes de demandes incidentes en fonction la personne qui les a formées ou contre qui elles sont dirigées :

  • la demande additionnelle : une partie modifie ses prétentions antérieures (article 65CPC). Il est nécessaire qu’elle soit liée à la demande initiale par un lien suffisant,
  • la demande reconventionnelle : le défendeur prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention adverse (article 64 du CPC),
  • la demande en intervention : elle peut être volontaire lorsqu’elle est spontanément formée par un tiers, ou la demande en intervention peut être forcée lorsqu’elle est dirigée contre un tiers (article 66 CPC).

Les moyens de la défense

Pour réagir aux prétentions du demandeur, le défendeur doit dès le début de l’instance présenter l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à justifier le rejet total ou partiel des prétentions de la partie adverse. Il peut faire valoir trois types de moyens de défense au regard de la finalité qu’il poursuit.

Tout d’abord, la défense au fond: l’article 71 du CPC dispose que «.. constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l’adversaire ». En d’autres termes, ce moyen vise à établir que la prétention de l’adversaire n’est pas fondée.

Remarque : elle peut être présentée à toute hauteur de la procédure (art. 72)

Ensuite, l’exception de procédure : ce moyen de défense sanctionne l’irrégularité des actes de procédure. L’article 73 du Code prévoit que : « Constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. ».

Voici quelques exemples d’exception de procédure :

  • les exceptions d’incompétence : lorsque le défendeur soutient que le tribunal est incompétent,
  • les exceptions de litispendance et de connexité : le défendeur soutient que l’affaire est déjà pendante devant une autre juridiction ou qu’il existe un lien tellement étroit entre cette demande et une autre déjà pendante devant un autre tribunal qu’en les jugeant séparément on risquerait d’aboutir à des contrariétés de jugement,
  • les exceptions de nullité : le défendeur soutient que la procédure suivie est irrégulière.

Remarque : selon l’article 74 du CPC, les exceptions doivent être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir

Enfin, la fin de non-recevoir : C’est un moyen de défense visant à sanctionner le défaut de droit d’agir en justice par un rejet de la demande, sans examen au fond. Selon l’article 122 CPC « constitue une fin de non–recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

Remarque : elle peut être proposée en tout état de cause (art 123CPC), toutefois le juge peut condamner une partie à des dommages et intérêts si elle s’est abstenue dans une intention dilatoire de la soulever plus tôt, Cass. 2ème civ., 27 février 2003.

Le rôle du juge

Enfin concernant le rôle du juge, celui-ci doit répondre dans la décision qu’il rend (jugement, ordonnance ou arrêt), à l’ensemble des moyens invoqués, les motivations, sous peine de vice de forme.

Dans un premier temps tout d’abord, il doit examiner les moyens des parties pour savoir si leurs prétentions peuvent être légitimement invoquées.

Qui plus est, l’article 5 du CPC impose une limite au juge dans l’exercice de ces fonctions. Cet article dispose que « Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé », de ce fait, il est soumis à la règle de « l’ultra petita », c’est-à-dire qu’il lui est interdit de statuer au delà des demandes des parties. Néanmoins, il peut soulever d’office des moyens dit  » d’ordre public  » qui peuvent également être soulevés par les parties, par exemple les moyens relatifs aux règles de compétence.

Ensuite, le juge lors de sa saisine doit respecter le principe du contradictoire, essentiel pour que chacune des parties disposent des armes nécessaires à assurer sa défense.

Dès lors, il ne peut fonder sa décision, ni sur des moyens, ni sur des prétentions non soumis à un débat contradictoire, ni sur des pièces produites par une partie, mais non communiquées à l’adversaire.

Qui plus est, le juge ne peut faire état dans sa décision, d’une règle de droit autre que celle invoquée par les parties, sans solliciter leurs observations. Ce principe découle de l’article 16 alinéa 3 du CPC qui dispose que : « Le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevé d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »

Remarque :  le juge a l’obligation de répondre aux motivations, sous peine de nullité de l’arrêt. Illustre cette obligation, l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, du 31 mai 2011, « Est nul l’arrêt d’une Cour d’appel qui, dans sa motivation, n’a pas visé, avec l’indication de leur date, les conclusions déposées par l’une des parties, qui n’a pas exposé succinctement les prétentions et les moyens figurant dans ses dernières conclusions ».

Pour aller plus loin dans l’analyse de la jurisprudence

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