L’intelligence artificielle générative : qu’en pensent les professions juridiques ?

Publié le 27 septembre 2024

4 minutes de lecture

L’irruption de l’intelligence artificielle générative (IA) dans le domaine juridique suscite à la fois enthousiasme et appréhension. En examinant les récentes enquêtes menées par OpinionWay pour Lamy Liaisons et l’European Legal Tech Association (ELTA) en collaboration avec Lefebvre Sarrut, LexisNexis, Wolters Kluwer, et le Village de la Justice, nous pouvons avoir un aperçu des avantages, défis et questionnements éthiques que cette technologie pose. Analysons en profondeur ces dynamiques pour comprendre l’impact potentiel de l’IA générative sur les métiers du droit.

Un usage en croissance mais motivé par la prudence

Les enquêtes révèlent que les professionnels du droit, en majorité, ont commencé à explorer les capacités des IA génératives. La curiosité motive 29% des utilisateurs, tandis que d’autres l’utilisent pour produire des textes non-juridiques (25%) ou des résumés (14%). Cependant, l’utilisation principale reste la recherche d’informations, un domaine où 69% des répondants ont trouvé une valeur ajoutée (*).

Les attentes principales concernent la rédaction de documents (34%), la recherche juridique (26%), et la préparation de résumés et de synthèses (17%). Plus de la moitié des professionnels (54%) utilisent l’IA générative pour rédiger des documents, et un tiers pour rédiger des e-mails (32%) (*).

Un gain d’efficacité et de temps

Les avantages perçus de l’IA générative sont multiples (****) :

  • Réalisation de tâches à faible valeur ajoutée (78%)
  • Facilité pour générer des résumés  (68%)
  • Gain de temps pour créer des contenus divers (67%)
  • Traduction de documents (57%)
  • Inspiration pour de nouvelles idées (56%)

Ces bénéfices montrent que l’IA générative peut alléger les tâches répétitives et chronophages, permettant aux juristes de se concentrer sur des activités à plus forte valeur ajoutée.

Transparence et confiance : les piliers de l’adoption

L’IA générative soulève des questions de transparence et de confiance. Près de la moitié des professionnels interrogés ne sont pas sûrs de faire confiance à ces technologies ou ne leur font pas confiance (*). La transparence est donc essentielle, comme le soulignent 91% des répondants qui estiment nécessaire d’informer les consommateurs et d’imposer des mentions telles que « contenu en partie généré par intelligence artificielle » (****).

Cette exigence de transparence est cruciale pour maintenir la confiance des clients et garantir que l’usage de l’IA se fait de manière éthique et responsable.

Les risques éthiques et juridiques

Les préoccupations éthiques sont au cœur des débats sur l’IA générative. Les principaux risques identifiés incluent (*) :

  • Confidentialité des données (data privacy)
  • Biais algorithmiques et questions d’éthique et de moralité
  • Responsabilité et violation de la propriété intellectuelle
  • Défis réglementaires

85% des professionnels du droit sont préoccupés par les implications éthiques de l’IA générative (**), et un tiers d’entre eux expriment des préoccupations significatives. Les enjeux de confidentialité des données (79%) et la désinformation (76%) sont particulièrement préoccupants (****).

Des freins à surmonter

L’adoption de l’IA générative se heurte à plusieurs obstacles (***) :

  • Organisationnels : 44%
  • Connaissances et compétences limitées : 36%
  • Financiers : 10%

Ces freins montrent la nécessité d’une formation adéquate et d’un soutien organisationnel pour intégrer pleinement l’IA générative dans les pratiques juridiques.

Une perception d’impact majeur

L’impact potentiel de l’IA générative sur les métiers du droit est largement reconnu. 86% des répondants estiment que son impact sera très important ou plutôt important. Cette perception est partagée également entre avocats et juristes.

Un besoin de compétences spécifiques

L’utilisation de l’IA générative nécessite des compétences spécifiques, ce que 72% des professionnels reconnaissent. Cette exigence souligne l’importance de la formation continue et de l’adaptation des curriculums académiques pour intégrer des modules sur les technologies émergentes.

Diversité des utilisations

Outre la recherche juridique (64%), l’IA générative est utilisée pour la traduction de documents (31%) et la rédaction d’e-mails (26%), montrant une diversité d’applications potentielles.

Une transformation à double tranchant

L’IA générative offre des opportunités immenses pour le secteur juridique, en automatisant les tâches répétitives et en augmentant l’efficacité opérationnelle. Cependant, elle soulève également des questions cruciales de transparence, de confiance et d’éthique.

Les professionnels du droit devront naviguer prudemment entre les avantages et les risques. Une adoption réussie de l’IA générative nécessitera des politiques de transparence rigoureuses, des formations adéquates et une réflexion éthique profonde pour garantir que cette technologie serve le bien commun sans compromettre les valeurs fondamentales de la profession juridique.

En fin de compte, l’avenir de l’IA générative dans le droit dépendra de notre capacité à équilibrer innovation et responsabilité, à intégrer ces outils de manière réfléchie et à continuer à placer l’humain au cœur de la pratique juridique.

Ci-dessous les liens des enquêtes et sondages :

Un article de Morgane Labiste et Lucine Chassagnon
Etudiantes du Magistère Droit Journalisme Communication d’Aix-Marseille Université