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Dans le cadre d’un contrôle de cotisations et suite à la lettre d’observations envoyée par l’URSSAF, commence une période de discussion avec des échanges contradictoires. Pratiquement, le cotisant a la faculté de répondre aux arguments de l’organisme (CSS R 243-59 III al 8), sachant que dans cette hypothèse, l’inspecteur sera tenu de répondre (« chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l’objet d’une réponse motivée » CSS art R 243-59 III al du CSS).
Mais au juste, ce délai de réponse est il enfermé dans un délai et des modalités de mises en œuvre.
La situation n’est guère aisée puisqu’il convient de jongler entre les dispositions des articles L 243-7-1 A al 2 et R 243-59 III al 8 du Code de la sécurité sociale (loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018 – décret n° 2019-1050 du 11 octobre 2019). En effet,
▪ La personne contrôlée dispose d’un délai de trente jours pour répondre à la lettre d’observations (CSS R 243-59 III al 8 – le délai de réponse du cotisant était à l’origine de 8 jours, porté à 15 jours par le décret n° 90-1009 du 14 novembre 1990, puis à 30 jours par le décret n° 99-434 du 28 mai 1999)
▪ Cette durée peut être prolongée sur demande de la personne contrôlée reçue par l’organisme avant l’expiration du délai initial, à l’exclusion de situations d’abus de droit (CSS L. 243-7-2) ou de travail illégal (C trav art L. 8211-1) (CSS art L243-7-1 A al 2)
▪ Ce délai peut être porté, à la demande de la personne contrôlée, à soixante jours (CSS art R 243-59 III al 8)
▪ A défaut de réponse de l’organisme de recouvrement, la prolongation du délai est considérée comme étant acceptée (CSS art R 243-59 III al 8 – Ces derniers délais s’inspirent directement de ceux existant en matière de contrôle fiscal V. liv proc fisc art L 11 et L 57)
Certes, faute de réponse de l’URSSAF, la prolongation est automatique. Mais, en allant plus loin, l’organisme peut-il s’opposer à cette prolongation du délai de 30 jours (hormis le cas d’abus de droit ou de travail illégal) ?
Telle était la question posée à la Cour d’appel de Nancy dans une affaire oùà la suite de la lettre d’observations du 10 décembre 2019, une société avait demandé un délai supplémentaire d’une durée d’un mois motivé par l’ampleur du redressement sur l’ensemble des sociétés du groupe. Par courrier du 10 janvier 2020, l’URSSAF avait sèchement répondu à la demande de prolongation dans les termes suivants : « Cette prolongation vous est refusée. Vos observations devront donc nous parvenir avant le 16 janvier 2020 ».
Cette attitude est tout aussi sèchement condamnée par la Cour d’appel de Nancy pour laquelle, en refusant de prolonger la période contradictoire, de surcroit sans motif permettant de le justifier, à la société qui s’est trouvée dans ces conditions dans l’impossibilité de répondre aux observations de l’URSSAF avant l’émission de la mise en demeure (et qui ne se confondent pas avec les échanges intervenus au cours du contrôle de nature différente) le redressement était nul (Nancy. Chambre Sociale-1ère sect. 21 novembre 2023. RG n° 23/00375)
La messe est dite : sauf exceptions prévues par les textes ou motivation dument explicité (et serait susceptible de faire l’objet d’un recours), la prolongation est de droit.
François Taquet Professeur de Droit social (IESEG, SKEMA BS) Avocat, spécialiste en Droit du travail et protection sociale Directeur scientifique du réseau d’avocats GESICA